Le syndrome de glissement chez les personnes âgées
- L'équipe de Famillys
- 3 juil.
- 11 min de lecture
La définition du syndrome de glissement est un état de grande déstabilisation physique et psychique marqué par différents symptômes comme l’anorexie, l'apathie, la dénutrition, un comportement de repli, de détérioration et d’opposition. La personne est dans un refus total d’amélioration de sa condition de vie. Que cela soit les soins, bouger, s’alimenter, le désir disparaît. Jour après jour son état de santé se dégrade, la personne perd son autonomie et traverse un processus de déclin allant jusqu'à la mort.

Le syndrome de glissement est un concept gériatrique décrit pour la première en 1956 par le gériatre Jean Carrié. Il est l'auteur d'une thèse où il a défini ce déclin sévère comme :
Un processus d'involution et de sénescence porté à son état le plus complet.
Depuis les années 1950, ce concept de syndrome du glissement a connu un certain développement, mais il reste cependant controversé dans le corps médical. Certains y trouvent une pertinence clinique alors que d’autres estiment que son utilisation comporte certains risques.
Plusieurs auteurs ont exploré depuis le concept du syndrome de glissement et ses implications. Notons par exemple :
Catherine Wieder a écrit un article intitulé Le syndrome de glissement dans la revue Topique, où elle analyse les aspects culturels liés à ce syndrome.
Marc Bourscheid a publié une thèse en 2023 intitulée Syndrome de glissement : histoire et évolution de ce concept de psychogériatrie controversé, qui examine l'histoire et les controverses vécues autour de ce concept.
Fannie Bretelle avec un article intitulé Syndrome de glissement : entre diagnostic illusoire et réalité clinique, qui discute des défis cliniques liés à ce syndrome.
Ces travaux offrent des perspectives variées, allant de l'analyse clinique à l'exploration des implications sociales.
Il est important de savoir qu’entre 1 à 4% de la population gériatrique hospitalisée en psychiatrie souffrirait de ce syndrome de glissement et que dans 85% des cas, cela mène malheureusement à un décès. Pour un patient souffrant du syndrome de glissement, il peut se laisser mourir en quelques semaines si le traumatisme n’est pas diagnostiqué à temps selon certains auteurs de thèses sur le thème.
Dans cet article, nous dressons un tableau large sur la question, mettrons en avant les différentes causes de ce syndrome de glissement ainsi que les formes exprimées, moyens et diagnostic permettant de l’identifier dans les temps pour éviter une fin tragique.
SOMMAIRE
Les causes et symptômes du syndrome de glissement
Il faut savoir que le syndrome de glissement touche dans la grande majorité des cas les personnes du grand âge, c'est à dire âgées d’environ 80 ans. La pathologie se déclenche généralement après un trouble psychique lié à un choc émotionnel physique ou psychologique. Ainsi, le facteur déclenchant peut être un des point suivants que recherche le médecin traitant :
Perte d’autonomie soudaine ou détérioration rapide de l'état général
Perte de poids, fatigue généralisée, refus alimentaire
Traumatisme comme la perte d’un proche (généralement le/la conjoint(e))
Maladie aiguë
Intervention chirurgicale
Départ à la retraite et perte de confiance en soi avec un isolement au domicile et pas grand chose à faire au quotidien
Départ, déménagement des proches ou équivalent comme facteur déclencheur
Stress post traumatique et complications
Hospitalisation et sortie d'hospitalisation
Entrée en maison de retraite / entrée en EHPAD peut-être mal préparée en amont et mal vécue par la suite
Accident, fractures, chutes, infection, etc…
C’est pourquoi il est important de surveiller l'état général de la personne lorsqu’un des évènements déclencheurs cités ci-dessus existe et de prendre le point de vue d'un spécialiste. Le syndrome de glissement sur le sujet peut apparaître 1 jour voire 1 mois après les faits.

Comment prévenir le syndrome de glissement ?
Le syndrome de glissement évolue très rapidement lorsqu’il est diagnostiqué, l’évolution est brutale et donc liée à des difficultés de prise en charge. C’est la raison pour laquelle, il est primordial pour les proches de la personne de maintenir un contact presque quotidien et un cadre chaleureux au domicile lorsque celle-ci subit un évènement tragique par exemple.
La majorité des seniors souffrants de ce syndrome de glissement sont atteints également de pathologies plus ou moins graves.
Combien de temps faut-il pour que le syndrome de glissement se développe ?
En terme de prévention, une intervention rapide est nécessaire dès les premiers signes inhabituels ou les troubles constatés. Sa progression varie selon les individus, mais il peut évoluer en quelques jours à quelques semaines si aucune intervention n'est mise en place par la suite. Plus le syndrome de glissement chez une personne sera traité en amont de son évolution, plus elle aura des chances de ne pas se laisser partir en refusant toutes aides extérieurs et de garder le goût à la vie.
L'accompagnement est un cadre bénéfique : entourer son proche qui traverse un passage de décompensation, lui montrer son soutien et son aide physiquement ou psychologiquement en s'assurant qu'il suit une alimentation équilibrée est nécessaire pour le maintien d’un état stable.
Malheureusement, si la moindre action n'est menée pour se battre à ses côtés et lui permettre de retrouver une situation généralisée équilibrée, l'espérance de vie d'une personne atteinte du syndrome de glissement est très courte.
Les symptômes et manifestations du syndrome de glissement
Les symptômes du syndrome de glissement peuvent être similaires à ceux d’une dépression intense ou soudaine. De nombreuses études ont vu le jour depuis les années 1950, certains pays considèrent que le syndrome de glissement est une sorte de dépression chez les seniors comme un renoncement à la vie ou un suicide inconscient.
Les symptômes du syndrome de glissement sont considérés comme similaires, car, la personne devient fragile, ne se bat plus et n’a plus goût en la vie. Le manque d’envie, la perte d’appétit associée à une baisse du moral et un repli sur soi sont des états qui caractérisent le syndrome de glissement et doivent vous alerter. Généralement l’anxiété est également présente.
Voici une liste des différents symptômes du syndrome de glissement auxquelles il faut faire attention lorsque votre proche subit un évènement brutal :
Anorexie ou/et dénutrition liées à un refus de se nourrir
Fatigue intense, apathie, refus de bouger
Déshydratation (absence de soif ou adipsie)
Oppositions aux soins
Signes dépressifs, désir de mort
Agressivité ou grande passivité (changement de comportement soudain)
Constipation chronique
Mutisme (refus de communiquer) et absence de liens sociaux
Clinophilie (refus de se lever)
Quelle réaction faut-il adopter lorsqu’on suspecte un syndrome de glissement ?
S’il y a un conseil important à adopter, c’est de réagir le plus vite possible après le diagnostic, car la personne souffrant de ce syndrome de glissement ne fera en aucun appel à l’aide et n'exprimera aucun désir. Il est toujours compliqué pour le proche de se rendre compte de l’état que traverse la personne, c’est pourquoi comme nous l’avons expliqué plusieurs fois dans cet article, c’est de rester en contact quotidien avec votre proche pour alerter en cas de déclin, voir d’éventuel changement d'humeur, de comportement, d’envie ou non etc…
Réagir rapidement, c’est en effet permettre à la personne de guérir de ses troubles qui peuvent entraîner la mort. Car, dans 85% des cas de personnes souffrant de ce syndrome, malheureusement, le risque de complication est très fort et ils en décèdent sans prise en charge rapide.
Le syndrome de glissement et la dépression profonde partagent certains symptômes communs, mais ils diffèrent par leurs causes, manifestations et traitements qu'une équipe soignante saura analyser :
Déclencheurs :
Le syndrome de glissement chez la personne est souvent déclenché par un événement particulier soudain, comme une hospitalisation, un déménagement subi, une perte d'autonomie ou un choc émotionnel.
La dépression peut avoir des causes variées, incluant des facteurs génétiques, biologiques ou émotionnels, et peut survenir sans événement déclencheur évident.
Symptômes physiques :
Le syndrome de glissement se caractérise par un refus de s'alimenter, des épisodes de déshydratation, une perte rapide de poids et une faiblesse extrême.
La dépression peut inclure une fatigue persistante et des douleurs corporelles, mais ces symptômes sont généralement moins aigus.
État psychologique :
Le syndrome de glissement est marqué par une résignation et un désintérêt total pour la vie, sans culpabilité ou pensées suicidaires explicites.
La dépression inclut souvent une tristesse profonde, une angoisse, des sentiments de culpabilité et parfois des pensées suicidaires.
Urgence et traitement :
Le syndrome de glissement nécessite une intervention immédiate pour traiter la cause sous-jacente et rétablir la santé physique.
La conséquence est une dépression qui peut nécessiter un traitement psychologique ou médicamenteux, mais l'urgence est généralement moindre.
Ces distinctions entre les pathologies sont des informations essentielles pour adapter la prise en charge psychiatrique la plus pertinente. En l'absence de traitement en cours, nous vous conseillons de consulter pour une évaluation médicale précise.
Quelles bonnes pratiques pour les aidants et comment agir efficacement face à cette situation difficile ?
Voici quelques exemples de situation pouvant vous inspirer et vous donner des clés, développons ensemble cette notion en détail pour une meilleure compréhension des pratiques de gestion du syndrome de glissement :
1. Réhydratation et renutrition
Lorsque le syndrome de glissement chez la personne se manifeste, le proche âgé peut refuser de s'alimenter ou de boire, ce qui entraîne une dégradation rapide et sévère de son état physique. Une prise en charge efficace commence par une réhydratation (par voie orale ou intraveineuse si nécessaire) et une renutrition progressive équilibrée. L'objectif est de restaurer l'équilibre hydrique et d'assurer un apport suffisant en nutriments essentiels comme les protéines, les vitamines et les minéraux. Des aliments riches en énergie et faciles à consommer, comme des purées, des bouillons ou des compléments alimentaires, peuvent être utilisés.
2. Soutien psychologique précoce
Les personnes atteintes du syndrome de glissement ont souvent perdu toute envie de continuer à vivre, un sentiment de fin de vie s'instaure dans leurs têtes. Un suivi psychologique individualisé précoce par un service médical est essentiel pour identifier et traiter les causes émotionnelles profondes de ce changement soudain. Cela peut inclure des séances avec un psychologue, un psychiatre ou un thérapeute, mais également des approches équivalentes comme la musicothérapie ou l'art-thérapie pour réengager progressivement l'individu. Le soutien psychologique aide aussi à diminuer le sentiment d'abandon ou de désespoir.
3. Stimulation sociale et cognitive
L'isolement social est un facteur aggravant pour le syndrome de glissement. Encourager des interactions régulières avec la famille, les amis ou les aidants professionnels est crucial. Cela peut se faire à travers des conversations, des activités en groupe ou des sorties. La stimulation cognitive, comme des jeux de mémoire, des puzzles ou la lecture, peut également aider à maintenir un sentiment d'utilité et à raviver l'intérêt pour la vie quotidienne.
4. Approche pluridisciplinaire
Une prise en charge réussie nécessite des conseils et une collaboration spécifique étroite entre plusieurs professionnels de santé : médecins généralistes, spécialistes en psychiatrie (gériatres ou psychiatres), diététiciens, kinésithérapeutes, et travailleurs sociaux. Cette équipe peut élaborer un plan personnalisé, incluant des objectifs physiques, nutritionnels et psychologiques, pour aider la personne à retrouver un état stable.
5. Implication de la famille
Le rôle de la famille est primordial pour aider une personne à surmonter le syndrome de glissement. Les proches peuvent offrir un soutien moral continu, partager des moments de qualité et recréer une ambiance chaleureuse et une humeur aimante. Participer aux soins et montrer une présence constante peut grandement améliorer l'état exprimé et la motivation du patient.
La présence d'enfants peut être très utile dans la gestion du syndrome de glissement, mais son efficacité dépend du contexte et de la relation entre l'individu concerné et l'enfant.
Voici pourquoi cela peut être bénéfique :
Apport d'énergie et de vitalité : L'entrée des enfants, par leur nature spontanée et joyeuse, peut insuffler une énergie positive et raviver l'intérêt pour les interactions sociales.
Réactivation des souvenirs : Les interactions avec des enfants peuvent rappeler des moments heureux du passé, comme ceux passés avec leurs propres enfants ou petits-enfants, suscitant ainsi des humeurs et émotions positives.
Stimulation émotionnelle : Les liens intergénérationnels créent souvent une dynamique affective riche, redonnant du sens et de la motivation à des individus qui se sentent parfois isolés ou inutiles pour se battre.
Ritualisation et activité : Les enfants amènent souvent des routines ou des activités associées (jeux, lecture, promenade), qui peuvent stimuler la personne touchée par le syndrome de glissement.
Cependant, il est important de noter que leur présence doit être bien encadrée et adaptée à la situation. Certains individus peuvent être trop fragiles pour tolérer beaucoup de bruit inhabituel ou d'agitation. Dans ce cas, il vaut mieux être prudent : une approche douce et progressive est préférable.
Comment est pris en charge le syndrome de glissement selon les établissements ?
Dans la majorité des cas, l'EHPAD est considéré comme la meilleure solution pour prendre en charge ces personnes avec le syndrome de glissement . L'équipement en téléassistance, les conseils et la présence quotidienne généralisée du personnel soignant et des praticiens seront les plus à même de prodiguer les soins nécessaires qui peuvent s’avérer complexes pour les proches du sujet âgé si ce dernier reste seul en retrait à la maison.

La solution de famille d'accueil pour personnes âgées peut aussi être considérée parmi les options car elle permet de lutter contre l'isolement des séniors et d'avoir accès à des soins médicaux équivalents au domicile de l'accueillant. En France, cette alternative aux Ehpads est une solution plus adaptée pour lutter contre une forme de dépression et contre l'isolement. En accueil temporaire comme en permanent, cela soulage la charge mentale des aidants familiaux et leur permet de souffler pendant le suivi médical de leurs parents.
Mettre en place un accueil de jour peut aussi permettre de nouer des liens pour les personnes et d'éviter la dépression et ce syndrome de glissement.
Dans un premier temps, la renutrition, la réhydratation ainsi qu’un suivi psychothérapeutique doivent être les premiers soins à donner à une personne âgée souffrant de cette maladie et dès que les signaux inhabituels apparaissent.
Cependant, afin que la guérison soit totale, il faudra mettre en place plusieurs actions :
Rééducation à l’effort et exercices jusqu'à entrevoir une voie de guérison (le manque d’activité physique et l'alitement prolongé pendant ces semaines, le patient perd en effet en masse musculaire et donc tient difficilement sur ses jambes, rester debout devient un effort beaucoup trop important à la fin)
Mettre en place un suivi avec un psychologue afin de veiller au mieux au processus de rétablissement de la personne âgée et de veiller à sa santé mentale.
Enfin, s'occuper d'une personne atteinte du syndrome de glissement est une expérience émotionnellement et physiquement exigeante.
Voici quelques conseils pour aider les aidants à traverser cette période difficile tout en préservant leur propre bien-être :
1. Maintenir une communication ouverte
Ecoutez les besoins et les ressentis de la personne aidée. Votre empathie peut avoir un impact positif sur son rétablissement.
Impliquez la famille et les amis dans l'accompagnement, pour partager la responsabilité de façon équilibrée et éviter l'épuisement.
2. Apprendre à demander de l'aide
Il est essentiel de savoir que vous n’êtes pas seul dans cette démarche. Contactez des professionnels de santé ou des associations spécialisées qui sauront vous prodiguer de bons conseils.
Envisagez l’intervention d’un aidant professionnel ou des services de soins à domicile pour vous accompagner.
3. Prendre soin de soi
Trouvez des moments pour vous ressourcer : faites de l'exercice, méditez ou engagez-vous dans une activité qui vous détend. Votre bien-être est vital pour continuer à aider efficacement.
Dormez suffisamment et maintenez une alimentation équilibrée, même si vos journées sont chargées.
4. Rester informé
Comprendre le syndrome de glissement et ses symptômes peut vous permettre d’agir rapidement et de mieux gérer la situation. Lisez des ressources fiables ou participez à des ateliers ou groupes de soutien.
5. Fixer des limites
Définissez ce que vous pouvez raisonnablement faire sans vous surcharger. Il est normal de reconnaître vos limites et de demander du soutien si nécessaire.
6. Trouver une aide à vos côtés
Parlez de vos sentiments à un proche ou faîtes vous accompagner par un professionnel, comme un psychologue. Cela vaut mieux pour faire face à l'anxiété, à la tristesse ou au stress.
Enfin, rappelez-vous que votre rôle est précieux et que chaque geste compte. Être un aidant, c'est offrir un don de soi inestimable et se battre pour celui qu'on aime, mais cela ne signifie pas que vous devez vous sacrifier entièrement.